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Santiago Amigorena

Le ghetto intérieur

Editions P.O.L 2019

Au moment où Santiago Amigorena publie son dernier livre « Premier exil », il est encore temps de revenir sur le précédent désormais édité en livre de poche : « Le Ghetto intérieur ». Sorti en 2019, il méritait davantage d’intérêt de la critique. L’histoire est simple, l’écriture lumineuse et, en achevant sa lecture on ressent ce que tant de familles ont pu vivre au terme de la seconde guerre mondiale.

Vicente Rosenberg a émigré en Argentine en 1928 où il vit paisiblement avec son épouse et ses trois enfants. Les liens sont devenus évasifs avec le vieux continent et, plus spécifiquement, avec sa mère restée à Varsovie ainsi que le reste de sa famille. Surgit la guerre et l’occupation de la Pologne par les nazis et Vicente n’a plus que des nouvelles sporadiques de sa famille jusqu’au moment où ces nouvelles s’éteignent. Alors qu’il avait volontairement mis de la distance entre sa vie en Argentine et sa Pologne natale, il est pris du remords de n’avoir pas davantage agi pour faire venir sa mère. Ce remords se concrétise par un mutisme presque total dont il ne parvient plus à sortir. La fin des hostilités lui apprendra que sa mère a disparu en camp de concentration, ainsi que le reste de sa famille.

Le récit est à la fois bouleversant et éclairant. Le temps et l’éloignement ne dispensent jamais de la responsabilité que l’on porte vis-à-vis des siens et du secours qu’on leur doit. Leur malheur fait porter sur soi une culpabilité dont on ne se remet jamais.

Philippe Méchet