Philippe Méchet et Timothée Nicolas

Faites de la politique !

L’Observatoire

 Au milieu de tous les livres qui s’amusent, jugent et critiquent la politique et les politiques, voici enfin un ouvrage d’analyse et de réflexion, d’enquête aussi, sur les fondements de l’engagement public.

Constatant à regret que la politique est en disgrâce, qu’une grande partie des élites se détourne de la politique « parce que la vraie vie est ailleurs », les auteurs déplorent que les idées soient devenues secondaires par rapport aux égos, que les primaires n’aient pas remplacé le débat des idées, que l’émiettement des partis politiques et la force des réseaux sociaux les aient tous affaiblis. En outre, les partis n’ont plus à rechercher des adhérents pour se financer depuis la loi de 1988 sur leur financement par l’État. S’ajoutent à ces constats argumentés, le culte du court terme et la loi de l’immédiateté.

« Les élus sont sans boussoles dans des partis sans gouvernail » observent les auteurs qui regrettent par ailleurs que les priorités se multiplient au lieu de s’organiser et qu’en conséquence, les promesses fourre-tout des campagnes électorales débouchent inévitablement sur la déception du corps électoral.

La démocratie a-t’elle donc perdu la bataille? L’engagement politique n’est-il plus qu’un souvenir? Les auteurs sondent les responsables publics de tous bords pour comprendre les circonstances qui les ont menés à agir en politique et saisir leurs motivations pour s’investir dans les arènes du pouvoir. A l’évidence, hier comme aujourd’hui, se perpétuent quelques règles: celle du hasard, bien sûr, de l’exemple à suivre, de la tradition familiale ou de l’ambition.

Comment la technocratie a-t-elle enfanté des carrières politiques? Pourquoi tant d’avocats ou de juristes, mais aussi, de représentants syndicaux ou associatifs, d’enseignants ou d’entrepreneurs ont-ils pris le risque d’une carrière politique? De nombreux témoignages emprunts d’une sincérité que les auteurs sont parvenus à susciter permettent de comprendre tour à tour, Édith Cresson et Valéry Giscard d’Estaing, Jean-Marie Le Pen et plusieurs députés de la République en Marche.

Parce que les auteurs ont conçu leur ouvrage comme une démarche utile à la démocratie et non comme une simple enquête sur ses faiblesses, leur dernier chapitre propose des pistes pour « raviver la flamme de l’engagement politique ».

En six chapitres sans langue de bois, Philippe Méchet et Timothée Nicolas délivrent une ordonnance capable en effet de stopper une hémorragie de talents dont la démocratie ne se remettrait pas.

Il faut redonner de la dignité à la fonction publique, assumer la responsabilité de gouverner, renforcer la démocratie représentative, en finir avec le système des primaires, accroître le rôle des partis politiques…redonner le goût de l’intérêt général aux citoyens, et donc, comme l’indique le titre de cet ouvrage intelligent, complet et optimiste, « faire de la politique ».

Philippe Langenieux-Villard