Amin Maalouf

Le naufrage des civilisations
Éditions Grasset

L’essai d’Amin Maalouf est un récit international destiné à expliquer pourquoi les peuples ne peuvent plus vivre ensemble. Dans cet ouvrage, qu’il définit comme un avertissement, l’écrivain emploie la littérature et la poésie pour engager son lecteur sur ce qu’il est et deviendra. Que sera l’Humanité sans une civilisation, témoin des romans nationaux entremêlés, et artisan de relations pacifiées entre les individus ?

Amin Maalouf témoigne, dans Le naufrage des civilisations, d’un prisme personnel sur le paysage géopolitique mondial par son expérience humaine et journalistique. Cette réflexion trouve ses racines dans l’héritage franco-libanais de l’auteur, dont les ancêtres ont connu l’apogée glorieuse du Levant – un Proche-Orient établi dans une tradition millénaire et dont le rayonnement, par ses lumières, constituait sa renommée.

L’amorce de conflits internationaux dans les années 1950 a fait fuir l’envie créatrice de ces terres. Le Liban des années soixante s’est fait le théâtre sanglant de la question palestinienne pendant plus de vingt ans. C’est en hommage à ces civilisations déchues qu’Amin Maalouf choisit d’établir dans son œuvre un itinéraire débutant par Beyrouth, sa ville natale et l’origine des ténèbres qui se poursuivent par le « grand renversement du monde » de l’année 1979.

Pour l’auteur, le monde comprenait en son sein des civilisations, et les civilisations comprenaient des sociétés avec des valeurs. Les civilisations sont devenues des empires, les sociétés sont devenues des puissances – et l’Homme poursuit une course sans but après la gloire et l’avidité dans un cadre où les éléments de la conquête ont été bouleversés –.

En 1979, ce n’est pas seulement Téhéran qui se réveille : une révolution conservatrice s’étend désormais au-delà des frontières de l’Iran, et impacte une sphère internationale en expansion, de la situation politique au Liban, à l’avènement de Margaret Thatcher au Royaume-Uni, jusqu’à l’élection de Reagan aux Etats-Unis en 1980. « L’année du grand renversement » a profondément changé la face du monde, et annoncé un avenir éteint aux hommes qui, s’ils n'assument plus leur responsabilité et leurs valeurs, se laissent aliéner en même temps que leur langage, leur culture, leurs libertés et leur civilisation, prise en otage.

Amin Maalouf dessine une vérité : « [la] crainte de voir disparaître tout ce qui donne un sens à l’aventure humaine » face au « spectre d’un naufrage imminent », dans un livre poignant et indispensable à l’éducation des hommes aujourd’hui.

Le Regard de Jeanne