LES ENFANTS DE JAURES

Jean-Pierre rioux

odile jacob

Jean Jaurès n’a jamais pris part à un seul gouvernement. Pourtant, il est l’inspirateur principal du socialisme français du vingtième siècle. Il en est « le père », selon Jean-Pierre Rioux, spécialiste de l’histoire politique en France.

Mais qu’ont perpétué les grands leaders de la gauche, Blum, Mollet, Mendes-France, Mitterrand, Rocard, des préceptes de Jaurès, au cours d’un siècle de luttes et face à un peuple « secret et redoutable »?

L’auteur s’appuie principalement sur les réactions vives provoqués par la mort de chacun d’eux dans la presse pour tenter de percer les traces de postérité, les indices de ce que la mémoire collective pourrait retenir de leur action.

S’il admet volontiers que « trop d’hommage défigure », il tente pourtant, à travers les mots prononcés devant les cercueils, les phrases écrites dans les nécrologies, les haines dissimulés, les admirations exprimées, les silences évocateurs, de dresser un bilan moral et politique de ces grandes figures de la gauche.

Avec une plume bienveillante, jean-Pierre Rioux cherche les porteurs de flambeau de la pensée de Jaurès, ceux qui ont retenu les leçons du « martyr de la paix » qui déclarait: « Le principal ou plutôt le seul obstacle au progrès, c’est l’égoïsme. Il ravage toutes les âmes ».

L’auteur mesure combien, dès leur mort, le souvenir laissé par chacun de ces hommes d’action se limite à une ou deux mesures prises et quelques phrases. C’est l’injustice d’une société qui se dépêche à enterrer ses gloires, qui avale les destins sans chercher à les comprendre, qui oublie leurs efforts pour ne retenir que les faiblesses. « Aucun, cependant, n’a manqué ni de dévouement à la cause, ni de sens du bien commun, ni de charisme personnel » conclut Jean-Pierre Rioux qui, tout en appelant le « Docteur Jaurès au secours », espère que « l’espoir n’a jamais dit son dernier mot ».