Les crises récentes, comme celles en cours, permettent de ressentir avec une certaine acuité l’importance et les bouleversements des relations internationales. Les transformations du Quai d’Orsay ces quarante dernières années offrent une passionnante clé de lecture de ces bouleversements. Diplomatie française, dirigé par le Professeur Maurice Vaïsse, est à la fois un livre historique et un ouvrage thématique aux multiples “portes d’entrée”. A chacune et chacun d’aborder cette analyse issue d’une collaboration de chercheurs - historiens, politologues et experts des relations internationales - et praticiens et professionnels - diplomates, conservateurs d’archives et hauts fonctionnaires - en suivant le fil du livre ou en choisissant une “entrée” de l’ouvrage. Nous recommanderions volontiers deux portes d’entrée : celle des “ressources humaines” (chapitre premier de la quatrième partie relative aux moyens de l’action diplomatique) et celle des “instances de la décision” (qui est l’objet de la première partie). Une voie utile pour identifier les femmes - de plus en plus nombreuses à occuper des postes clés (!) - et les hommes de la diplomatie française, avant de comprendre les structures, les outils, les moyens et les actions d’une diplomatie française de plus en plus mondialisée et européanisée, diversifiée (en matière économique en particulier), professionnelle et rationalisée… d’une diplomatie en collaboration, ou en concurrence, avec d’autres acteurs, du monde économique et de la société civile. C’est dans ces “ressources humaines” et leurs décisionnaires que semble résider le plus profond et structurant défi de notre diplomatie ces prochaines années. Une diplomatie, comme l’État, soumise au double impératif de devoir être à la fois au service de et à l’image de notre société, dans un monde et un contexte qui la mettent sous tension. On peut lire, symboliquement (mais pas que…), que près de 800 personnes peuvent prétendre à un poste d’ambassadeur, pour 180 ambassadeurs et représentants français dans le monde : comment mobiliser et occuper ces femmes et ces hommes ? Une question qui nous permet de rappeler que notre diplomatie, ses “Outils et acteurs depuis 1980” - pour reprendre le sous-titre de l’ouvrage - n’est pas figée. Elle est dynamique, dans un monde travaillé par de profonds bouleversements. Une lecture passionnante, un manuel et un livre de chevet qui posent, autrement, la question du rôle et de la réforme de l’État, ou, pourrions-nous lui préférer, celle des rôles et des réformes de L’État.

Edward Chekly