Laurent Telo

Voyage au bout de la gauche

éditions Stock

Celui qui cherche dans les coulisses de la folle campagne de la gauche lors de l’élection présidentielle puis des législatives de 2021, une explication à sa défaite, doit lire Laurent Telo. Le journaliste du Monde a suivi jour après jour les candidats, et raconte ici les incroyables erreurs commises par ceux qui prétendaient à la responsabilité suprême.

La première partie, « Carnets de campagne », dévoile les atermoiements pourtant couverts de certitudes, d’Anne Hidalgo, qui, délibérément seule dans ses choix, n’écoutant que son mari convaincu d’une victoire, multiplie les erreurs stratégiques et les fautes de comportement. L’auteur nous introduit ensuite dans le système de Yannick Jadot, trop préoccupé par l’estime de soi pour écouter un entourage éberlué par « l’eau tiède » que déverse l’écologiste. « Zemour ou Macron imposent un récit. Nous, on vend des chaudières », résume froidement Sandrine Rousseau. Mais le tableau ne serait pas complet sans la révélation des espoirs de François Hollande, convaincu qu’Anne Hidalgo sera « débranchée », lui offrant ainsi l’occasion d’être un recours. On s’y prépare, avec allégresse, mais c’est sans compter sur l’indécision finale et le renoncement qui s’ensuit. Enfin, visite chez Jean-Luc Mélenchon, l’intrépide, qui doit avant tout éviter tout dérapage mais aussi composer avec son tempérament pour devenir respectable et compatible avec les autres courants de la gauche. « On n’a pas le temps de jouer 25 rôles dans la vie », tempère Laurent Telo: Mélenchon fera du Mélenchon.

La deuxième partie, « les jours qui ont fait la Nupes » est un long compte-rendu des discussions intervenues entre les différentes formations de gauche après l’élection présidentielle en vue d’éviter la débâcle aux législatives. Une phrase résume parfaitement l’état d’esprit des partenaires de la France Insoumise devenue première force d’opposition après Marine Le Pen: « ils étaient devenus des machines à consentir plutôt que des machines à penser ». Laurent Telo se glisse dans les haines, les jalousies, les arrières-pensées, les hypocrisies qui animent les acteurs déboussolés par l’ampleur du gâchis électoral présidentiel.

Enfin, le journaliste esquisse les jours d’après en se demandant quel avenir peut aujourd’hui espérer une force politique artificielle (La Nupes) bien qu’un certain nombre des responsables politiques n’y manquent ni de talents ni d’ambitions.

Malgré le caractère conjoncturel de ces pages, le lecteur peut trouver ici des clefs d’explication au revers historique de la gauche, et peut-être, imaginer des règles de conduite nouvelles pour ses combats futurs.