Ghislain Knepper

Robert SchumAN

La politique pour vocation

Salvator

 Né en 1886 d’un père d’origine française et d’une mère luxembourgeoise, tous trois devenus allemands en raison des vicissitudes de l’histoire, Robert Schuman a entamé sa vie politique par devoir, conçu son exercice avec une rigueur extrême et défendu ses convictions humanistes jusqu’à son dernier souffle.

Cet ouvrage relate un parcours exceptionnel, non pas seulement par les succès électoraux et politiques d’une carrière brillante, mais d’abord par l’ascétisme et l’humilité de cet homme qu’aucune responsabilité - y compris aux plus hauts niveaux de l’Etat - n’a détourné d’une austérité de vie dédiée au respect de ses convictions religieuses.

Elu député en 1919, il est nommé sous-secrétaire d’Etat aux réfugiés sous le gouvernement de Paul Reynaud, reconduit dans ces fonctions sous le premier gouvernement du maréchal Pétain dont il vota les pleins pouvoirs en 1940.

Prenant très vite ses distances avec le gouvernement de Vichy, il est le premier député français emprisonné par les nazis. Il s’évade en aout 1942 et poursuit son action en faveur des réfugiés dans la clandestinité. En 1945, il est frappé d’indignité nationale mais recouvre très vite ses droits civiques, rentre dans le gouvernement Bidault puis devient chef du gouvernement en 1947 pour huit mois, un record sous la IVème République.

En mai 1950, il prononce la déclaration fondatrice de la communauté européenne du charbon et de l’acier.

« Etre droit est le meilleur moyen d’être adroit » répétait ce catholique fervent, célibataire et secret, que certains moquaient pour sa lenteur à décider (« C’est un moteur à gaz pauvre », affirmait Georges Bidault) mais qu’une droiture absolue, un respect strict des fonds publics, préservait des injures, des insultes et des moqueries d’une classe politique qu’il dominait par son sens de l’Etat.

Moine laïc ou bénédictin dans le monde, Robert Schuman incarne à l’évidence une manière unique d’exercer le pouvoir.

Le 19 juin 2021, le pape François la reconnu « vénérable », un statut justifié par son engagement catholique au service de l’église dans la droite ligne de l’encyclique « rerum novarum «  de 1891suggérant aux catholiques de s’engager dans le domaine social.

Livre hagiographique? Sans doute. Mais tellement bienvenu dans cette époque qui dénigre avec gourmandise les politiques sans mesurer qu’il s’en trouve parmi eux d’exceptionnels, engagés « par vocation » davantage que par ambition au service de leur terre et de leurs convictions.

Philippe Langenieux-Villard