“Tragédie française”

Franz-Olivier Giesbert

Le regard de Philippe LanGÉnieux villard

Avec la verve qu’on lui connait, F.O.G. prend une fois de plus tous les risques dans cette « histoire intime » où il exprime sans fard son point de vue sur une classe politique à laquelle il reproche mensonges, reniements et faiblesses, laisser-faire en matière d’immigration et laisser-aller dans le domaine budgétaire. On se demande parfois s’il pourra encore serrer la main de certains responsables politiques dont il décrit les manières et l’action sans la moindre retenue. Il faut admettre que cette « franchise » ne manque ni de panache ni de vérité. D’emblée, il fustige une situation où « le roman national se réduit quasiment à l’esclavage, au pétainisme et à la colonisation: s’il reste un fil conducteur, c’est celui de l’abjection et de la repentance » se désole-t’il. « Les déconstructeurs ont presque fini le travail », ajoute-t-il un peu plus loin.

La cruauté des portraits de plusieurs responsables publics témoigne de la déception que leur politique a générée. Pierre Bérégovoy « avec son air de batracien avantageux », Laurent Fabius « qui pense pauvre et parle plat », « le narcissisme photogénique et la goinfrerie pécuniaire » de Bernard Kouchner, ou encore, Emmanuel Macron, « chèvrechouiste » s’appliquant à vouloir faire plaisir à tout le monde.

Le journaliste ne néglige pas une peinture contrastée de son métier qu’il « y a trois façons de pratiquer, debout, assis ou couché ». En racontant les années au Nouvel Obs puis son départ pour le Figaro avec tout ce que ce changement signifie pour lui (la liberté) et pour les autres (le traitre), l’auteur dévoile la complexité du métier, mais aussi ses joies, comme par exemple la personnalité attachante de Robert Hersant. Nulle idolâtrie n’en découle, mais une forme de reconnaissance qui rassure sur la capacité de gratitude d’un écrivain si souvent féroce.

Les pages les plus incisives de ce remarquable exercice de mémoire et de style concernent d’une part l’invraisemblable faiblesse de nos politiques à l’égard du problème de l’immigration, et d’autre part l’incroyable politisation de la magistrature et des institutions judiciaires avec leurs conséquences dévastatrices pour la décision politique en général. Avec des exemples précis et confondants, Franz-Olivier Giesbert fait une démonstration implacable de la partialité judiciaire. On se prend à espérer qu’il n’ait jamais à comparaître devant un juge…

 

Disponible aux Éditions Gallimard